2001 : La liberté pour l'écrivain

 

La revendication de liberté pour l’écrivain est légitime ; s’il ne s’agit nullement de lui imposer une sorte de dictature qui serait une forme pernicieuse de censure, encore faut-il qu’il sache quel usage faire de sa liberté. L’écrivain doit accepter d’assumer entièrement son texte, y compris les errements probables, accepter que la lecture en soit pluriperspectiviste, accepter l’irresponsabilité au sens juridique du terme. 
L’écrivain n’est pas comptable des lectures qui sont faites de son texte. Mais il y a une exigence éthique irréductible : l’entière liberté de conscience qui demeure encore « une idée neuve en Afrique ». 
Là gît la véritable liberté qui ne saurait s’accommoder de grilles prétendues objectives, de règles impérieuses, ni des compromissions, compositions, conformismes de toutes sortes. L’écrivain en son geste inaugural est d’abord quelqu’un qui dit, qui sait dire NON. Non aux classifications arbitraires, aux ghettos composés, non aux modes, à la récupération, non aux catalogues, aux casiers, décidés ici ou ailleurs. Bien plus souvent ailleurs qu’ici. 
Alors faut-il révoquer en doute la critique occidentale ? Là est le vrai problème. En effet de quel lieu le critique occidental parle-t-il ? De quel droit « légifère-t-il » ? Sait-il de quoi il parle quand ce qui est dit est adossé à des valeurs implicites qu’il ne connaît pas toujours ? Quand ce qui est dit est fortement lié à l’oralité qui en quelque sorte entre dans la littérature écrite par effraction ? On sait la mésaventure arrivée aux Soleils des Indépendances de Ahmadou Kourouma. Prenons un autre exemple : l’engagement. C’est paraît-il dépassé ! On lui reproche ici et là, d’un air dédaigneux, de ne point relever de la modernité ! En cette matière je suis, j’ose le dire, résolument archaïque. La littérature négro-africaine doit être engagée pour des raisons essentielles liées au statut même de l’écrivain négro-africain. Certes les formes de l’engagement ont changé. Mais imaginerait-on un écrivain négro-africain décrivant sur une centaine de pages, même avec brio décrit, une porte qui se ferme ! 
Il faut s’entendre : toute littérature a besoin de critique comme « le levain la farine blanche ». La critique est libre, elle est nécessaire ! Mais qu’est-ce qu’une critique littéraire sinon le parcours subjectif d’une œuvre ? Certes « le fait de pondre des œufs ne permet pas à la poule d’apprécier la qualité d’une omelette ». Donc mon refus ici et je le dis clairement, c’est l’expression d’une subjectivité érigée en règle, d’un regard transformé en norme. Je peux aimer Henri Lopès, Sassine, Boris, j’admets aussi que d’autres ne les aiment pas. Je réclame simplement l’humilité, car enfin, de quel droit ferais-je de ma lecture, la seule valable ? 
Par contre l’écrivain négro-africain doit être particulièrement vigilant par rapport à un double danger bien réel celui-là contre lequel David DIOP, il y a trois décennies, nous avait mis en garde. Etonnante modernité. Ces dangers sont l’africanisme facile ou l’assimilation à tout prix !

             Hamidou DIA 
                   « Créations et Liberté » in les Actes de la Biennale des Lettres 1990.

 

1. Résumez ce texte d’environ 520 mots au quart de sa longueur. (Une marge plus au moins de 10 % est tolérée). 

 

2. Discutez cette affirmation de l’auteur : « La littérature négro-africaine doit être engagée pour des raisons essentielles liées au statut même de l’écrivain négro-africain ».

 

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