1994 : Senghor (Chaka)

 

Mon calvaire. 

Je voyais dans un songe tous les pays aux quatre coins de l’horizon soumis à la règle, à l’équerre et au compas, 
Les forêts fauchées les collines anéanties, vallons et fleuves dans les fers. 
Je voyais les pays aux quatre coins de l’horizon sous la grille tracée par les doubles routes de fer. 
Je voyais les peuples du Sud comme une fourmilière de silence 
Au travail. Le travail est saint, le travail n’est plus le geste, 
Le tam-tam ni la voix ne rythment plus les gestes des saisons. Peuples du Sud dans les chantiers, les ports les mines les manufactures 
Et le soir ségrégés dans les kraals [1] de la misère. 
Et les peuples entassent des montagnes d’or noir d’or rouge 
Et. ils crèvent de faim. 
Et je vis un matin, sortant de la brume de l’aube, la forêt des têtes laineuses, 
Les bras fanés le ventre cave, des yeux et des lèvres immenses appelant un dieu impossible.
Pouvais- je rester sourd à tant de souffrances bafouées ?

 

    Léopold Sédar SENGHOR, Ethiopiques (1958)

 

Vous ferez de ce poème un commentaire suivi ou composé. Vous pourrez dégager par exemple les procédés littéraires par lesquels SENGHOR exprime sa compassion pour les peuples du Sud et plus généralement, sa condamnation du mode de vie des pays industrialisés.

 

Notes

[1] Kraal : dans le texte, équivalent de ghetto

 

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